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Incident voyageurs

 

Dalibor Frioux

 

Seuil

 

 

Précieuses vies humaines...

 

Des voyageurs sont bloqués un matin dans une rame du RER, dans un tunnel, en raison d'un incident voyageur. Ils ne peuvent plus sortir et personne ne vient les secourir. Serrés les uns contre les autres, ils sont entassés corps contre corps, visages contre visages. Cette proximité physique devient vite repoussante, écoeurante : la saleté, les odeurs, les sécrétions, les défauts des corps que l'on touche, les imperfections de la peau, le bruit des autres. Le dégoût des autres. Ils sont deux mille voyageurs prisonniers, hommes, femmes, enfants, et cela dure pendant deux ans. Un cauchemar. Un enfer.

 

Petit-à-petit une organisation se met en place pour survivre, se nourrir, vivre ensemble.

 

Trois personnages sont coincés dans cette masse humaine et racontent ce qu'ils vivent. Anna, une mère avec son enfant, caissière au Monoprix, s'adresse à son enfant. Kevin, en recherche d'emploi, vit de missions temporaires, habite dans le sous-sol d'un parking, et s'adresse à sa conseillère du Pôle emploi. Vincent, directeur au Louvre, s'adresse à son amie. Ils parlent de leur vie ici, en bas, et de leur vie d'avant, en haut.

 

Cette histoire se dévoile progressivement. Elle évoque les relations humaines, la masse étouffante des voyageurs, le travail, les employeurs et les employés, les classes sociales, l'enfermement. Il y a des mélanges, des oppositions entre la beauté et la laideur, la gentillesse et la méchanceté, la promiscuité et l'espace, l'enfermement et la liberté, l'aisance et la pauvreté, le haut et le bas, la lumière et l'obscurité. On ressent le malaise, la nausée, le dégoût des voyageurs, nos sens sont agressés.

C'est un roman froid, tendu, inquiétant, parfois dérangeant et aussi souvent drôle. 

 

 

J'ai aimé...

-l'imagination : un récit imaginaire créatif, inventif, riche, dense, profond, complexe. Du réel et du délire. Plein d'idées. Brillant.

L'auteur, Dalibor Frioux, prof de philo, apprécie l'oeuvre de Kafka.

-la construction du roman avec un personnage par chapître rend le roman dynamique, rythmé, pas ennuyeux.

-l'humour : des scènes, des répliques, des dialogues, des situations absurdes, imaginaires, très drôles, malgré le contexte cauchemardesque. 

-c'est souvent théâtral (le huis-clos sous terre, les scènes humoristiques) et cinématographique (les scènes de la vie d'avant).

-l'écriture est agréable à lire, vivante, visuelle.

-la fin est belle, un moment d'émotion qui fait du bien.

 

 

 

 

 

 

"Voilà ce que je hais dans le nombre, l'entassement dont je fais partie à présent : comme pour les grands monuments, trop de témoins tue l'émerveillement."

"Nous avons tant parlé, bavé, ruminé, que nous avons emprisonné toutes les paroles humaines dans la rame."

© 2016 par Balades littéraires.

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